"When Hubert Félix meets THIEFAINE"

Hubert Félix THIEFAINE tenait à informer les internautes sur l'approche de la fin de la tournée SCANDALE MELANCOLIQUE en livrant une interview exclusive :
17 Novembre 1971 (arrivée à PARIS) - 17 Novembre 2006 (fin de la tournée)
35 ans de scène, bilan
:

Interview Hubert Félix Thiéfaine
16 Octobre 2006

DS : Que t’as vraiment apporté, avec le recul, la collaboration avec la jeune génération qui a participé à l’élaboration de « scandale mélancolique » ?

Ma timidité et la cruauté récurrente des cours de récréation, m’ont très vite éloigné des personnes de ma propre génération. Par cet album, j’ai vraiment découvert la joie de travailler avec des gens qui avaient la même sensibilité et la même énergie désespérée que moi.

NA : Quel est ta chanson préférée sur cet album ?

Je les préfère toutes !

NA : Au cours de la tournée promotionnelle qui a suivi sa sortie, tu avais laissé entendre que le lead guitare serait Philippe Paradis, réalisateur de l’album ; Or, il semblerait qu'après avoir entamé les répétitions, tu aies décidé d’abandonner cette option. Peut-on connaître les raisons de ce changement soudain ?

La question est mal posée parce que l’information donnée est fausse. Philippe Paradis s’est retiré pour des « raisons familiales…. »  et ce, avant les répétitions. Pour des questions de principe, j’ai dissous le groupe qu’il avait formé, pour en reformer un autre qui correspondait davantage à mes visions du show 2006 …
Et j’avoue que je suis très fier et très heureux de mon choix … 

NA : Malgré le téléchargement (P2P) qui fait inévitablement baisser les ventes d'album, "Scandale Mélancolique" est maintenant disque d'or si je ne me trompe pas, et la tournée marche très bien. Comment expliques-tu ce succès, après l'accueil mitigé de son prédécesseur "Défloration 13" ?

J’écris seul, dans le silence et loin du public. Je me consacre uniquement à la          chanson que j’ai envie d’entendre, et j’y travaille jusqu’à ce que le résultat me plaise. « Défloration 13 » est mon album préféré et de loin le plus audacieux avec « Dernières balises  » 

NA : Après une tournée en acoustique, seul avec ta guitare, quel effet ça fait de retrouver des musiciens autour de soi ?

Je ne suis plus obligé de prendre du magnésium pour les crampes, ni d’utiliser      du collodion pour me cicatriser le bout des doigts .

La tournée en solitaire était plus une demande du public qu’un désir personnel. L’artiste a des droits, mais aussi des devoirs . Sur cette tournée, j’entends de nouveau de la musique autour de moi, et ça m’éclate totalement.Après le 17 novembre, je vais avoir du mal à oublier toute cette magie des sons et des rythmes qui jaillit chaque soir sur scène. Musicalement, je suis né dans le rock, et je crois que c’est irréparable !

NA : Tu as recours à un prompteur depuis la dernière tournée. Qui en a eu l'idée ? Et ce   genre de « béquille » n'est-il pas dangereux à long terme ?

J’ai également recours à  des guitares , basses , batteries, claviers , consoles de mix , sons et lights, des camions, des bus-tour, des caterings, des pantalons à fermeture éclair ! le danger est partout !

Toutefois , les gens bien informés savent que le prompteur fait aujourd’hui partie intégrante de toutes les scènes du monde, au même titre que les ear monitors, et autres technologies actuelles. Aussi banal et répandu que la direction assistée sur les voitures !  

NA : J'aime beaucoup la chanson "Confessions d'un never been". Cependant je m'attendais à une version scène beaucoup plus tonique plutôt qu’une interprétation quasi identique à la version studio. N'est-ce pas un peu dommage ?

N’est-ce pas un peu dommage de reprendre trop fidèlement l’album dont la tournée porte le nom ? N’est-ce pas un peu dommage de ne pas avoir non plus changé le texte et la mélodie? 

NA : La tournée actuelle se termine le 17 nov. au Zénith de Paris. Que peut-on attendre de cette date un peu particulière, une sorte de remake de ce qui a été fait à Arc et Senans, ou tout autre chose ?

Pour ce dernier concert… on donnera le même spectacle qu’à Arc et Senans , mais en marionnettes et sous- titré.

En fait ce sera le même concert qu’à Bercy , mais en plus court , avec d’autres titres, d’autres lumières, et une nouvelle équipe de musiciens. C’est un spectacle qui se rapproche aussi de l’Elysée Montmartre en 1988, et de l’Olympia en 1983. Disons que le chanteur sera le même.

DS : Qu’envisages tu de faire après la tournée « scandale mélancolique » ?

Vie privée et solitude. J’envisage d’apprendre à faire de la bicyclette, et de m’inscrire au Tour de France 2007…. Peut-être devenir médecin légiste…Peut-être monter un atelier de taxidermie avec des peaux humaines….. Et puis bien sûr , passer mon permis de tueur en série et de dealer de crack .

De toutes façons, il est tout à fait possible que cette tournée soit la dernière. Que j’arrête définitivement.

DS : Tu as écumé toutes les salles de concert de plusieurs pays, depuis 1973 ; 33 ans après toutes ces dates, tous ces gens, quel est ton bilan global de toutes ces tournées ? Ressens tu une fatigue ou lassitude au regard de tous ces kilomètres, ces chambres d’hôtel, ces jours passés dehors, loin de ta famille et de tous les petits plaisirs quotidiens ?

La question est belle et telle qu’il me faudrait presque y répondre par une monographie : intro - thèse - antithèse - conclusion. J’irai directement à la conclusion : pour moi, le luxe, c’est de dormir 3 nuits de suite dans le même lit : le Mien ! Je me sens, certes, fatigué, comme à la fin de chaque tournée , mais pas plus qu’après la tournée de 1981,1983,de 1985,de 1988 ….. de ………..

NA : Tu approches tout doucement de la soixantaine. Jusqu'à quand penses-tu pouvoir tourner dans une formule "rock" ?

J’imagine mal ce personnage que j’ai créé, mon personnage de Narcisse 81, me poser ce genre de question. Mon cher, prends soin de toi si tu veux vivre assez longtemps pour me voir attaquer ma phase réellement rock and roll.

DS : Finalement, est-ce que ça vaut le coup de faire le métier d’artiste ?

Tout ça vient d’une connerie de rêve de gosse ! Aujourd’hui je pense en octosyllabes, en décasyllabes, en alexandrins, avec des rimes, des rythmes et des césures …. Toujours en tapant du pied et en chantonnant. Je suis complètement déformé par toutes ces années .
Je ne sais pas s’il me sera facile d’arrêter de chanter mais il me sera impossible d’arrêter d’écrire .
C’est la raison pour laquelle je m’exerce en ce moment à prendre des notes pour un traité de mécanique métaphysique. Une sorte de critique de la théorie de l’attraction et de la chute chez Newton et Maxwell.
Un remake , en quelque sorte de la fille du coupeur de joints, mais en prose et beaucoup plus tendance physique que chimique !

DS : Comment mesures-tu ton parcours ( du combattant ) par rapport aux chanteurs de ta génération ?   

J’ai perdu le mètre étalon que j’avais volé au pavillon de Breteuil. Beaucoup de mes chers confrères sont devenus des has been, non ?

DS : Qu’est ce qui te stress le plus ? l’écriture, l’enregistrement en studio ou la scène ?

Un jour j’ai demandé à mon médecin s’il pouvait me donner quelque chose contre le stress. Une petite prescription … Il m’a répondu : «  non, non, ne changez rien, le stress vous va très bien. N’oubliez pas que c’est ça qui vous fait vivre ! »

Il est clair qu’on est stressé avant d’écrire et de composer. Et c’est pour ça qu’on écrit et qu’on compose. Au commencement était le stress et Dieu vit que cela était bon !

NA : Te verra-t-on retravailler un jour avec tes anciens collaborateurs, Tony Carbonare et Claude Mairet ou as-tu définitivement tourné la page ?

Je pense reformer les Skelett’s (1963). A moins que je ne reparte avec les Caïds Boys (1961) ; j’ai appris qu’ils n’étaient pas tous morts .

DS : Te sens tu libre avec tous les acteurs qui forment ton entourage ( Manager,      Producteur, Maison de disques, collaborateurs ) ?

Aujourd’hui oui ! Eux, je ne sais pas ! Libre comme un psychopathe qui vient de s’enfuir de l’HP.

DS : Tu t’es déjà expliqué plusieurs fois sur les entités qui forment ta personnalité : alors avec qui vis tu le mieux dans le fond : Hubert, Félix ou Thiéfaine ?

Il existe une quatrième entité dont je n’ai jamais parlé… c’est avec celle là que je vis le mieux !

DS : As-tu quelque chose à ajouter avant de clore cette interview ?

Les Suisses ont une sale manie de dire Adieu au lieu de dire Au revoir. J’aime bien les Suisses. Moi je préfère dire Good Night, surtout quand je sais que j’ai suffisamment de somnifères . En attendant d’être écrasé complètement par le monte-télécharge, je serai au Zénith de Paris le 17 Novembre 2006 .

J’étais arrivé à Paris le 17 Novembre 1971.

REQUIESCAT IN PACE !

Narcisse 81, Webmaster Planète Thiéfaine
David STAROSTA, Webmaster Thiéfaine.com